À Lomé, Israël expose ses ambitions économiques en Afrique de l’Ouest
Les points clés :
Le Foire Internationale de Lomé (FIL) accueillera du 28 novembre au 14 décembre 2025 à Lomé la 3ᵉ édition du Salon commercial d’Israël, organisée par la Chambre d’affaires Togo‑Israël.
Les échanges Togo-Israël couvrent plusieurs domaines stratégiques : agriculture, santé, formation, technologies, mise en avant des produits israéliens et plateforme pour les exportations togolaises.
Le volume des exportations togolaises vers Israël reste modeste (environ 222 000 US$ en 2024) mais l’événement symbolise une volonté d’amplifier les flux commerciaux et technologiques entre les deux pays.
Du 28 novembre au 14 décembre 2025, au cœur de la capitale togolaise, se tiendra la 20ᵉ édition de la Foire Internationale de Lomé (FIL) organisée par le Centre Togolais des Expositions et Foires (CETEF). Parmi les temps forts, la 3ᵉ édition du Salon commercial d’Israël, promue par la Chambre d’affaires Togo-Israël, vient marquer une mutation dans la coopération bilatérale entre Lomé et Tel-Aviv. Le choix d’Israël comme partenaire atteste de l’orientation stratégique vers la technologie, l’agro-industrie, l’innovation et la diversification des marchés d’exportation pour le Togo.
La coopération entre les deux pays s’inscrit dans une longue histoire : depuis plusieurs décennies, Israël intervient au Togo dans les domaines de l’agriculture, de la santé, de la formation professionnelle. Le salon représente donc non seulement un espace d’exposition mais un catalyseur pour approfondir les liens économiques, techniques et commerciaux.
Le contexte commercial et les flux actuels : modestie et potentiel
Selon les données de l’ONU COMTRADE via Trading Economics, les exportations du Togo vers Israël se sont élevées à environ 222 690 US$ en 2024. Par ailleurs, les importations israéliennes en provenance du Togo atteignaient environ 683 000 US$ en 2024. Autant dire que les échanges sont encore faibles en volume. Cela ne diminue pas la portée symbolique de l’événement, mais souligne que beaucoup reste à faire pour transformer cette coopération en contrats et chaînes de valeur concrètes.
Les domaines d’intervention sont nombreux : l’agriculture de précision, l’irrigation, la formation, les semences, la technologique au service de l’agro-industrie. Par exemple, un article rappelle qu’Israël et le Togo collaborent via MASHAV, l’agence de coopération israélienne, pour renforcer la formation professionnelle agropastorale. Ce salon à Lomé donne une tribune supplémentaire afin de stimuler les partenariats, de mettre en lumière le « Made in Togo » et d’attirer des investissements israéliens.
Enjeux multiples : technologie, diversification, intégration régionale
D’abord, l’orientation vers Israël marque la volonté du Togo de renforcer son volet technologique et d’innovation. Israël étant reconnu comme un leader dans la gestion de l’eau, l’agriculture en milieu semi-aride, la télémédecine et les technologies agro-alimentaires, la collaboration peut offrir un transfert de compétences précieux.
Ensuite, le salon permet d’offrir aux produits togolais une vitrine internationale. Bien que aujourd’hui les volumes soient faibles, l’événement pourrait stimuler l’exportation de produits à forte valeur ajoutée : riz rouge, fruits transformés, produits biologiques etc. Par exemple, une mission économique Togo-Israël mettait en avant le riz rouge togolais comme produit d’exportation.
Enfin, sur le plan régional, Lomé devient un hub d’échanges Afrique-Moyen Orient. Le salon peut favoriser des connexions indirectes vers d’autres marchés (CEDEAO, Afrique de l’Ouest) en jouant l’effet de passerelle. Le CETEF, structure d’accueil de la foire, rappelle qu’il vise à attirer plus de 1 250 exposants et environ 690 000 visiteurs lors de ses éditions.
Les défis à anticiper
Le potentiel est clair, mais les obstacles sont nombreux. Les faibles volumes actuels témoignent de la nécessité de structurer davantage la chaîne logistique, la qualité des produits, l’adaptation aux normes internationales, et la capacité des producteurs togolais à répondre aux exigences du marché israélien et plus largement du marché export.
L’autre défi est la transformation technologique et organisationnelle locale : les producteurs doivent être accompagnés pour adopter des technologies, pour se lancer dans la transformation agro-alimentaire, pour accéder aux marchés via Israël ou d’autres partenaires. Cela implique formation, financement, infrastructures et gouvernance.
Sur le plan commercial, l’élargissement des flux ne dépend pas uniquement de la foire, mais d’un cadre macro-économique stable, des infrastructures portuaires (le port de Lomé, le corridor Togo-marchés), d’une logistique fiable, d’une compétitivité des coûts et d’un cadre réglementaire attrayant.
Pourquoi est-ce important ?
Cet événement n’est pas simplement un salon commercial parmi d’autres : il s’inscrit dans un mouvement de repositionnement du Togo et de la sous-région ouest-africaine vers des partenariats plus stratégiques, vers la transformation agricole, vers l’intégration technologique et vers l’ouverture de nouveaux débouchés. En s’associant à Israël, le Togo cherche à tirer parti de l’expertise d’un pays à la pointe en matière d’agriculture, d’eau, de technologie et de petites exploitations à forte valeur ajoutée.
Pour l’économie ouest-africaine, ceci est une illustration que les alliances Sud-Sud / Afrique-Moyen-Orient peuvent offrir des modèles alternatifs à la dépendance traditionnelle aux grandes économies occidentales. Cela peut favoriser la diversification, la montée en gamme des exportations africaines et l’intégration régionale (via la CEDEAO, par exemple). Le salon à Lomé est alors à la fois symbole et levier.
Enfin, l’impact va au-delà du commerce : il s’agit de créer des emplois (transformation agro-alimentaire, logistique, services), de stimuler la modernisation de l’agriculture, d’augmenter la valeur ajoutée dans les chaînes de production locales et de renforcer la résilience économique des économies ouest-africaines au travers de partenariats innovants. Ce salon peut devenir une plateforme de rencontres, de co-innovation, d’échanges technologiques et de croissance symbiotique entre le Togo, Israël et la région.
Dans ce contexte, la 3ᵉ édition du Salon commercial d’Israël à Lomé peut être perçue comme un jalon stratégique, une opportunité à saisir pour le Togo et pour la sous-région. Sa réussite dépendra de la capacité à transformer l’exposition en contrats, en coopérations durables, en chaînes de valeur et en impacts économiques tangibles.