Bénin : le Gari « Sohoui » obtient l’IGP de lOAPI, un pas de plus pour la valorisation agro-alimentaire nationale


Les points clés :

  • Le semoule de manioc précuite « Gari Sohoui » de Savalou obtient officiellement sa reconnaissance d’Organisation africaine de la propriété intellectuelle (OAPI) comme Indication Géographique Protégée (IGP).

  • Cette distinction juridique protège le produit dans les 17 États membres de l’OAPI et renforce la valorisation du savoir-faire béninois.

  • Le label ouvre de nouvelles opportunités commerciales, de reconnaissance culturelle et de compétitivité pour les producteurs locaux.


Le Bénin inscrit un nouveau jalon dans la valorisation de son terroir agro-alimentaire avec l’attribution à son produit emblématique « Sohoui », cette spécialité locale de semoule de manioc précuite, du certificat d’Indication Géographique Protégée (IGP) délivré par l’OAPI. La cérémonie, organisée à Cotonou le 18 octobre 2025, a été présidée par la ministre de l’Industrie et du Commerce, Alimatou Shadiya Assouman.

Aux côtés du Gari Sohoui, l’huile d’arachide « Azimi » d’Agonlin obtient la même distinction, traduisant une volonté d’envergure de l’État béninois de porter ses produits agricoles au rang du patrimoine intellectuel et économique.

L’IGP, au-delà d’un label, est un instrument juridique protégeant l’origine, l’identité et la qualité : « Cette reconnaissance protège les producteurs, valorise un savoir-faire endogène et renforce l’identité culturelle de nos régions. C’est un gage de compétitivité et de durabilité pour notre économie », a déclaré la ministre.

Selon l’OAPI, la reconnaissance permet désormais aux produits détenteurs de cette IGP d’avoir une protection collective au sein des 17 États membres contre toute utilisation abusive ou contrefaçon.

Valorisation économique et potentiels de développement

Le Gari Sohoui ne se limite pas à une consommation locale : il incarne un savoir-faire artisanal ancestral et possède des qualités reconnues (texture, goût acidulé, haute capacité de conservation) qui lui valent une renommée nationale et sous-régionale.

Avec l’IGP, ce produit acquiert un statut de marque collective protégée : seuls les producteurs respectant les conditions géographiques, techniques et qualitatives pourront utiliser l’appellation « Gari Sohoui de Savalou ». Cela ouvre des possibilités d’accès à des marchés régionaux et internationaux, tout en renforçant la valeur ajoutée locale.

La mise en place de cette certification peut encourager une structuration de la filière, une amélioration de la qualité, des investissements dans la transformation, le conditionnement, l’exportation, mais aussi un meilleur prix pour les producteurs. Elle représente aussi une réponse à la concurrence des produits importés ou de substitution, en jouant sur l’authenticité, l’origine, la traçabilité.

Sur le plan culturel et symbolique, l’IGP confère une visibilité accrue au Bénin comme pays capable d’innover dans le domaine de la propriété intellectuelle et de l’agro-alimentaire. Elle constitue un levier de fierté nationale mais aussi de marketing territorial.

Intégration dans le cadre OAPI et la propriété intellectuelle

L’Organisation africaine de la propriété intellectuelle (OAPI) est une institution multinationale (17 États membres) chargée de la protection uniforme de la propriété industrielle, dont les indications géographiques.

L’enregistrement d’un produit comme IGP au sein de l’OAPI permet d’avoir un espace juridique partagé, facilitant l’usage du label à l’international, la lutte contre les contrefaçons et l’amélioration de la gouvernance des filières.

Pour le Bénin, cette reconnaissance s’ajoute à d’autres produits agro-alimentaires africains certifiés IGP (ex : café des montagnes de Man en Côte d’Ivoire, attiéké, etc.), ce qui montre une montée en puissance de la stratégie continentale de valorisation des terroirs.

Quels défis restent à relever ?

Si l’acquisition de l’IGP est une victoire symbolique et juridique, il reste à transformer ce label en retombées concrètes : augmentation des volumes vendus, montée en gamme, pénétration de nouveaux marchés, amélioration de revenus des producteurs.

La structuration de la chaîne, l’accès aux équipements de transformation, au conditionnement, aux normes d’exportation, aux logistiques de transport, au financement, à la formation des producteurs sont autant de chantiers à mener.

Par ailleurs, la gestion collective de l’IGP nécessite une gouvernance forte : groupements de producteurs, contrôle qualité, traçabilité, communication, branding. Il faut éviter que l’IGP reste un simple label sans valeur ajoutée tangible.

Enfin, la concurrence externe et les produits de substitution demeurent une menace : pour que l’IGP permette un différentiel économique, les consommateurs doivent reconnaître le label « Gari Sohoui de Savalou » comme gage de qualité et d’authenticité par rapport à d’autres produits.

Pourquoi est-ce important ?

Cette avancée du Bénin s’inscrit dans une dynamique plus large de l’agro-alimentaire ouest-africain : la quête de la valeur ajoutée, la maîtrise des chaînes de production, la construction des marques locales, la reconnaissance des savoir-faire endogènes et le renforcement de la propriété intellectuelle dans un contexte de marchés mondialisés et de concurrence accrue.

Pour l’économie ouest-africaine, l’IGP représente un levier essentiel : elle peut encourager la production locale, stimuler l’exportation, créer des emplois dans la transformation, améliorer les revenus ruraux, et renforcer l’identité agro-alimentaire du continent.

Dans la région, d’autres États membres de l’UEMOA ou de l’OAPI peuvent s’inspirer de ce modèle pour leurs propres produits terroir. Cela contribue à la diversification des exportations, à la souveraineté alimentaire, à l’industrialisation locale et à la compétitivité internationale des produits africains.

En bref, le Gari Sohoui-IGP n’est pas qu’un produit alimentaire protégé : c’est un symbole de ce que l’Afrique peut faire, quand elle valorise son patrimoine, structure ses filières et inscrit l’agriculture dans une stratégie de développement économique durable.

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