Lomé se donne des ailes : ASKY Airlines installe le tout premier simulateur Boeing 737 d’Afrique de l’Ouest


Les points clés :

  • La compagnie panafricaine ASKY Airlines, basée à Lomé, lancera d’ici juin 2026 un simulateur de vol Boeing 737, premier du genre en Afrique de l’Ouest.

  • Ce dispositif permettra une formation locale des pilotes, jusqu’à présent envoyés à l’étranger, réduisant les coûts, renforçant les compétences et positionnant le Togo comme hub aéronautique régional.

  • Le projet s’inscrit dans une vision économique plus large : stimuler la logistique, l’aviation, l’emploi qualifié et l’intégration africaine par le développement d’un pôle d’excellence technique à Lomé.


L’annonce faite par ASKY Airlines marque un tournant stratégique pour l’aviation et l’économie du Togo. Implantée depuis Lomé avec une base régionale, ASKY s’engage désormais à renforcer sa chaîne de valeur localement en installant un simulateur de vol de type Boeing 737, soit l’appareil majoritaire de sa flotte. Selon un article paru le 10 novembre 2025, le chantier du simulateur a été lancé dans un hangar de Lomé, 6 novembre ayant été la date officielle du coup d’envoi.

Ce projet revêt une double portée : d’une part, une dimension purement opérationnelle, permettre à la compagnie et à d’autres acteurs régionaux de s’entraîner sans avoir à recourir à des installations à l’étranger. Le CEO d’ASKY, Esayas Woldemariam Hailu, a précisé que cette infrastructure est « essentielle non seulement pour la formation de nos propres pilotes, mais aussi pour les compagnies régionales qui sont aujourd’hui contraintes de se rendre à l’étranger pour former leurs équipages ». D’autre part, une dimension économique et symbolique : faire du Togo un centre de formation aéronautique et technique en Afrique de l’Ouest.

Sur le plan concret, ce simulateur est annoncé comme devant être opérationnel au terme du premier semestre 2026 — précisément, d’ici juin 2026. Il est financé « sur fonds propres » par ASKY et construit en collaboration étroite avec l’Autorité Nationale de l’Aviation Civile du Togo (ANAC-Togo). L’enjeu est de taille : jusqu’ici, les pilotes d’ASKY ou d’autres compagnies de la sous-région devaient souvent être formés ailleurs. En localisant la formation, on réduit les coûts de transferts, les délais, les dépendances externes, et on insuffle une dynamique locale.

Pour le Togo, ce projet s’inscrit dans un contexte de montée en puissance de l’aviation et de la logistique. ASKY, en tant qu’acteur régional, dessert plusieurs dizaines de villes en Afrique de l’Ouest et du Centre. Installer un simulateur permet non seulement à ASKY d’améliorer ses processus internes mais aussi d’attirer des partenaires, des compagnies régionales, voire des institutions de formation aérienne ; ce qui peut générer des retombées en termes d’emplois qualifiés, de services associés (maintenance, formation, simulation), et d’attractivité du hub de Lomé.

Il faut aussi souligner l’effet d’accélération de l’écosystème technique aérien. Le simulateur deviendra un élément du paysage industriel aéronautique régional : les techniciens, les formateurs, les mécaniciens, les spécialistes de la simulation pourront se former et exercer localement. L’article mentionne d’ailleurs que ce projet s’inscrit dans une vision plus large d’un « écosystème aérien complet à Lomé », anticipation d’un centre de formation, d’un siège, d’une maintenance aéronautique.

Cependant, la transformation ne sera pas automatique. Le succès dépendra de plusieurs conditions. D’abord la garantie d’un cadre de certification reconnu : un simulateur ne suffit pas s’il n’aboutit pas à des licences standard internationales. La collaboration avec l’ANAC-Togo est un bon signe, mais la reconnaissance régionale ou internationale sera essentielle. Ensuite, il faudra que la demande régionale soit suffisante : d’autres compagnies ou acteurs auront-ils intérêt à venir former leurs pilotes à Lomé ? Le coût d’accès, la fiabilité, le positionnement géographique (transport, hébergement) devront être compétitifs. Enfin, l’effet multiplicateur sur l’économie togolaise dépendra de la capacité à développer les chaînes adjacentes (hébergement, restauration, transport, services techniques, maintenance, hébergement d’élèves).

Ce projet s’inscrit également dans une logique d’intégration ouest-africaine : un simulateur à Lomé peut être utile à des compagnies de la Cédéao, Mali, Niger, Burkina Faso, qui cherchent à limiter l’exportation de formations. Cela correspond à l’ambition régionale de valoriser les capacités locales et de réduire les fuites de devises liées à l’envoi d’éléments à l’étranger.

De plus, dans un secteur aérien de plus en plus compétitif et normé, disposer d’infrastructures de formation localement donne un avantage stratégique. Il y a aussi un effet de halo : lorsqu’un hub régional possède ses propres capacités de formation, cela améliore sa crédibilité, ses standards, son attractivité pour les compagnies, les investisseurs, les techniciens. On peut imaginer que Lomé se positionne comme l’un des pôles de l’aviation ouest-africaine.

Pourquoi est-ce important ?

D’un point de vue économique ouest-africain, ce projet d’ASKY à Lomé revêt une triple portée. En premier lieu, il contribue directement à la montée en compétences et à la localisation de la chaîne de valeur aéronautique. Cela signifie moins de dépendance à l’étranger, moins de transferts de capitaux hors région, et davantage de création de valeur locale, formation, maintenance, hébergement, services aux compagnies. Pour un pays comme le Togo, c’est un pas vers l’économie du savoir, vers des emplois qualifiés et une diversification économique.

En second lieu, il consolide la place de Lomé comme hub régional. Dans une sous-région où la logistique, l’aviation, le transport sont des leviers de développement, disposer d’un simulateur de vol de Boeing 737 apporte un avantage concurrentiel. Il peut attirer des compagnies, des partenariats, des flux de formation, ce qui génère des retombées non seulement au niveau de l’entreprise mais au niveau national (infrastructures associées, tourisme d’affaires, secteurs connexes).

Enfin, sur le plan de l’intégration sous-régionale ouest-africaine, ce type d’infrastructure symbolise la montée d’une Afrique qui construit ses capacités. Lorsque les compagnies régionales peuvent former leurs pilotes localement, c’est un gain d’autonomie, de réactivité, de coût. Cela contribue à renforcer l’aviation africaine, sujet clé pour le commerce intra-africain, la mobilité, la connectivité, et par conséquent pour le développement économique. Le projet d’ASKY et du Togo s’inscrit donc dans un mouvement où l’Afrique de l’Ouest se donne les moyens de ses ambitions, en matière de transport, de logistique, d’emploi, et s’émancipe progressivement des schémas importés.

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