Togo : 63 microfinances officiellement reconnues, mais un secteur largement plus vaste et fragmenté


Les points clés :

  • APSFD-Togo a récemment mis à jour sa liste de membres, qui compte désormais 63 institutions de microfinance officiellement affiliées.

  • Les registres officiels du ministère de l’économie recouvrent plus de 140 Systèmes Financiers Décentralisés (SFD) à travers le pays, montrant l’ampleur réelle et la fragmentation du secteur.

  • Cette mise à jour constitue un jalon vers plus de transparence, de professionnalisation et de régulation, essentielle pour renforcer la confiance, améliorer les services et soutenir l’inclusion financière.


Le secteur de la microfinance joue un rôle central dans l’économie togolaise. Dans un pays d’environ 8 millions d’habitants, beaucoup de ménages, petits producteurs, artisans ou micro-entrepreneurs n’ont pas accès aux banques classiques. Les Systèmes Financiers Décentralisés (SFD) comblent ce vide, en proposant crédit, épargne, services financiers adaptés à l’économie informelle ou rurale.

L’annonce récente de l’APSFD-Togo, mettant à jour sa liste à 63 membres, marque une étape importante. Cela signifie qu’un nombre significatif d’institutions s’engagent volontairement à respecter un cadre professionnel, des bonnes pratiques, des principes de gouvernance, et une certaine transparence dans leurs opérations. Affilier sa structure à APSFD-Togo, au-delà d’un simple “label”, implique un accompagnement, une harmonisation des pratiques, et un engagement à maintenir la qualité des services proposés.

Cependant, ces 63 institutions ne représentent qu’une partie du secteur : selon les données du ministère de l’Économie et des Finances, la Direction de la Microfinance recense plus de 140 SFD sur l’ensemble du territoire. Cela révèle un secteur profondément fragmenté, composé d’acteurs formels, semi-formels, parfois informels, avec des niveaux de structuration très différents : certaines institutions bien établies et encadrées, d’autres plus “artisanales”, parfois isolées, avec peu de supervision, peu de contrôle, et une visibilité réduite.

Un réseau structuré pour l’accès aux services financiers, mais à quel prix ?

Les institutions affiliées à APSFD-Togo sont réparties tant dans les grandes villes que dans les zones rurales, ce qui leur permet de toucher des populations souvent exclues des circuits bancaires. Elles offrent des services essentiels : micro-crédit, épargne, petits prêts pour des besoins de trésorerie, appui aux micro-entrepreneurs ou aux agriculteurs, services aux artisans, etc. Pour beaucoup, ces SFD sont des “bouées de sauvetage” financières, un point d’appui indispensable pour investir, produire, se développer.

Mais la multiplicité d’acteurs, la fragmentation, l’absence de standardisation forte peuvent poser des risques : hétérogénéité des pratiques, disparité de qualité, variabilité des taux, faiblesse de la gouvernance, manque de transparence. Sans cadre de régulation rigoureux, sans supervision, les plus vulnérables peuvent être exposés à des pratiques prédatrices.

La mise à jour de la liste APSFD-Togo apparaît alors comme un signal fort : un effort de structuration, de professionnalisation, de visibilité. Pour les usagers, c’est un indicateur de sécurité ; pour les partenaires techniques et les bailleurs, un repère de fiabilité. Pour les investisseurs, un élément de confiance.

Le défi de l’inclusion financière dans un contexte d’économie informelle

L’économie togolaise, comme celle de nombreux pays ouest-africains, repose en grande partie sur l’informel : petits commerces, micro-entreprises, agriculture familiale, artisanat, etc. Ces activités ont besoin de services financiers adaptés, micro-crédits, épargne, financement à petite échelle, flexibilité, proximité rurale ou périurbaine, des services que les banques classiques refusent souvent d’offrir.

Les SFD, structurés ou non, jouent un rôle vital pour l’inclusion financière : permettre l’accès au crédit, mobiliser l’épargne, accompagner les micro-entrepreneurs, soutenir les femmes, les ruraux, les populations marginalisées. Mais l’efficacité de ce rôle dépend de la qualité institutionnelle, de la régulation, de la transparence, de la gouvernance, précisément ce que la structuration d’APSFD-Togo cherche à promouvoir.

La coexistence de plus de 140 acteurs, avec des niveaux très variés de professionnalisme, implique un défi de supervision : comment garantir que tous respectent des pratiques responsables ? Comment protéger les clients vulnérables ? Comment favoriser les bonnes institutions et contrôler les plus fragiles ?

Pourquoi cette mise à jour de la liste APSFD-Togo est un signal fort ?

La décision d’actualiser la liste des membres affiliés montre une volonté de porter un regard plus structuré sur le secteur. En identifiant clairement qui adhère à l’association, en promouvant la transparence, la conformité, la qualité, l’APSFD-Togo rend le secteur plus lisible, pour les usagers, mais aussi pour les partenaires financiers, les bailleurs, les investisseurs.

Cette démarche peut contribuer à restaurer, ou renforcer, la confiance dans la microfinance, inciter davantage d’acteurs à rejoindre le cadre formel, encourager la consolidation, la consolidation de la gouvernance, la montée en qualité des services. Elle pourrait favoriser l’émergence de SFD robustes, fiables, capables d’être des piliers d’inclusion financière, de financement des PME, d’appui au développement rural, d’accès au crédit pour des populations vulnérables.

Pour le Togo, c’est une opportunité de structurer un des rares vecteurs d’inclusion financière — essentiel dans un pays où l’accès au crédit bancaire reste limité, où l’économie informelle est importante, où le secteur agricole et artisanal est prépondérant.

Pourquoi est-ce important ?

Parce que la microfinance quand elle est bien régulée peut être un pilier du développement économique et social. En structurant le secteur, en renforçant la gouvernance, en assurant la transparence, on bâtit un cadre de confiance. Cela permet aux petits entrepreneurs, aux artisans, aux agriculteurs, aux populations rurales ou urbaines modestes, d’accéder à l’épargne, au crédit, à des services financiers adaptés, ce qui peut favoriser la création d’activités, d’emplois, l’autonomie financière, l’investissement local.

Cette structuration peut aussi attirer des partenaires internationaux, des bailleurs, des investisseurs sociaux ou de développement, qui cherchent des interlocuteurs fiables, transparents, responsables, condition essentielle pour financer des projets d’infrastructure financière, des programmes d’inclusion, des innovations.

Pour l’économie togolaise, un secteur de microfinance fort, bien encadré, fiable, représente une filet de sécurité, un pont entre l’économie informelle et l’économie formelle, un levier pour le développement rural, l’entrepreneuriat, la réduction de la pauvreté, l’autonomisation des populations vulnérables.

C’est un enjeu de souveraineté économique, de résilience financière, d’équité et de justice sociale. La mise à jour de la liste de l’APSFD-Togo est un premier pas mais un pas nécessaire dans cette direction.

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