Le Nigéria propulse l’Afrique dans l’ère solaire : record inédit d’importations
Ce tournant solaire est bien plus qu’une simple tendance commerciale sur le continent
Les points clés :
Le Nigéria devient le 2ᵉ plus grand importateur de panneaux solaires en Afrique entre juin 2024 et juin 2025, avec 1 721 MW.
Les importations africaines ont bondi de 60 %, atteignant un record de 15 032 MW, avec une croissance marquée dans plusieurs pays comme l’Algérie (×33).
L’économie solaire pourrait révolutionner les systèmes énergétiques, avec des retours sur investissement de moins de six mois sur les économies de carburant.
Le Nigéria s’impose désormais comme un acteur énergétique de poids sur le continent. Entre juin 2024 et juin 2025, il a importé 1 721 MW de panneaux solaires, dépassant l’Égypte et ne cédant que la première marche à l’Afrique du Sud. Pendant la même période, les importations totales de panneaux solaires en Afrique ont atteint un record de 15 032 MW, soit une croissance de 60 % par rapport à l’année précédente.
Cette explosion des importations n’est pas l’œuvre d’un seul pays. Vingt États ont atteint un niveau historique, et vingt-cinq ont dépassé 100 MW importés, contre quinze seulement un an auparavant. Certains marchés ont connu des performances spectaculaires : l’Algérie en tête (×33), suivie par la Zambie (×8), le Botswana (×7), le Soudan (×6), et la RDC, le Bénin, l’Angola, l’Éthiopie et le Libéria ont plus que triplé leurs importations.
Le potentiel électrique induit par ces importations est considérable. Si tous les panneaux importés étaient installés, la Sierra Leone pourrait générer 61 % de son électricité 2023, le Tchad 49 %. Plusieurs autres pays comme le Libéria, la Somalie, l’Érythrée, le Togo et le Bénin verraient leur production grimper de plus de 10 %. Globalement, seize pays verraient une augmentation de plus de 5 % de leur production.
Sur le plan économique, le solaire constitue une opportunité majeure pour réduire les coûts énergétiques. Au Nigéria, un panneau solaire de 420 W à 60 USD produit environ 550 kWh par an. À l’inverse, 60 USD de diesel ne procurent que 275 kWh. Le retour sur investissement du panneau est donc de six mois seulement, et encore plus rapide dans d’autres pays africains. Cependant, il n’existe toujours aucun suivi fiable de l’installation effective des panneaux importés, ce qui ralentit les progrès.
Pourquoi est-ce important ?
Ce tournant solaire est bien plus qu’une simple tendance commerciale sur le continent. Il incarne une véritable transition énergétique en marche, portée par des économies réalistes face aux crises énergétiques chroniques.
Du point de vue économique, l'import massif de panneaux solaires crée un levier pivot : il réduit les importations de pétrole raffiné (dont la valeur est 30 à 107 fois supérieure à celle des panneaux), allège la pression sur les devises et propose une alternative viable à long terme.
Pour l’intégration régionale, ce mouvement crée une dynamique vertueuse illustrée par la diversification des importateurs, allant de grandes nations énergétiques aux pays les moins dotés en infrastructures. Le Nigéria, en tant que deuxième importateur, devient un acteur central d’une vague solaire qui pourrait restructurer les équilibres énergétiques africains.
Sur le plan politique, cette évolution met en lumière l’urgence d’investir dans la planification, la collecte de données et les systèmes de suivi pour que cette transition ne reste pas aléatoire. Le cas du Pakistan, cité comme exemple, démontre qu'une préparation solide peut éviter une transition désordonnée.
Enfin, ce mouvement se déroule à un moment stratégique pour l’Afrique, encore dépendante des énergies fossiles. Avec 25 % de son électricité produite à partir de sources propres en 2024, bien en deçà de la moyenne mondiale de 41 %, le continent dispose d’un levier immense pour accélérer son développement durable.