Numériques : les champions africains en 2025
Tech en Afrique (Crédit image : unplash)
Les points clés :
La République de Maurice, l’Afrique du Sud et le Botswana dominent le classement africain du développement numérique en 2025.
L’Afrique subsaharienne enregistre une progression notable de la parité numérique, atteignant 60 % en 2023.
Malgré ces avancées, la fracture numérique demeure profonde entre les pays africains et le reste du monde.
L’année 2025 confirme une tendance amorcée il y a plusieurs années : l’Afrique avance, certes à différents rythmes, mais avec détermination sur la voie du numérique. Le Digital Evolution Index 2025, publié par Digital Planet, rattaché à la Fletcher School aux États-Unis, éclaire cette dynamique. Basé sur 184 indicateurs évaluant l'environnement institutionnel, les conditions de demande et d'offre ainsi que la capacité d'innovation, ce rapport classe 25 pays africains.
La République de Maurice s’impose comme le leader africain du numérique, se hissant au 62e rang mondial avec un score de 52,31 points sur 100. L'Afrique du Sud suit au 66e rang (50,11 points), puis vient le Botswana à la 76e position.
Le succès de Maurice repose sur des infrastructures modernes, un climat d’affaires favorable et des politiques publiques soutenant l’innovation technologique.
Quant à l’Afrique du Sud, elle bénéficie d'un écosystème de start-ups dynamique, notamment à Cape Town et Johannesburg, combiné à des investissements significatifs dans les FinTech et l'Intelligence Artificielle.
En Afrique francophone, la Tunisie (79e mondiale) et le Maroc (87e) montrent aussi une belle progression, notamment grâce à des stratégies volontaristes d'e-administration et de soutien aux jeunes entreprises du numérique.
Des progrès en matière de parité numérique
Au-delà de l’essor technologique, un autre phénomène majeur ressort : la réduction de l’écart entre hommes et femmes dans l’accès au numérique.
Dans l'Afrique subsaharienne, la parité numérique – c'est-à-dire l’égal accès aux technologies entre les sexes – a augmenté de plus de 10 % en dix ans, atteignant 60 % en 2023.
Le cas de l’Ouganda est emblématique : en 2013, seulement 41,7 % des femmes avaient accès aux outils numériques contre 76,1 % en 2023. Ce bond spectaculaire résulte de programmes nationaux d'inclusion numérique ciblant les femmes rurales et urbaines, tels que Women in Tech Uganda.
Dans la région MENA (Moyen-Orient et Afrique du Nord), c’est l’Égypte qui impressionne : en une décennie, elle a vu la parité numérique progresser de 31 points, atteignant 68,6 %. Le pays a notamment misé sur l’alphabétisation numérique, la promotion des STEM (sciences, technologie, ingénierie, mathématiques) pour les jeunes filles et des incitations fiscales pour les entreprises recrutant des femmes dans la tech.
Une fracture numérique persistante
Cependant, derrière ces progrès se cachent de profondes inégalités.
À l’échelle mondiale, l’Amérique du Nord (États-Unis à 100 points) et l’Europe du Nord (Finlande, Danemark, Suède) dominent largement.
En comparaison, seuls 3 pays africains figurent parmi les 80 premiers mondiaux, soulignant le retard global du continent.
Par exemple, la première puissance économique d’Afrique, le Nigeria, ne se classe qu’à la 109e place, malgré l’explosion de son marché des paiements mobiles et des start-ups fintech comme Flutterwave ou Paystack.
Plus bas encore, on retrouve des pays comme :
Le Bénin (116e mondial),
Le Cameroun (119e),
Le Malawi (122e),
Et l’Angola (125e), dernier du classement.
Ces résultats traduisent des défis majeurs : accès limité à Internet dans les zones rurales, infrastructures de télécommunications insuffisantes, coût élevé de la connectivité et absence de politiques d’accompagnement robustes.
De plus, la fracture numérique interne grandit entre les riches et les pauvres dans de nombreux pays africains. Les populations rurales, moins éduquées et plus pauvres, sont les grandes oubliées de la révolution numérique en cours.
Pourquoi est-ce important ?
La montée en puissance du numérique en Afrique n'est pas simplement une question de modernisation technique ; elle engage l’avenir économique du continent.
Croissance économique : Une meilleure digitalisation permet de diversifier les économies, de créer de nouveaux marchés et d’attirer des investissements étrangers. Selon une étude de McKinsey, le numérique pourrait ajouter plus de 300 milliards de dollars au PIB africain d’ici 2025.
Création d’emplois : Les industries numériques (télécommunications, e-commerce, FinTech, e-éducation) sont aujourd'hui parmi les plus grands pourvoyeurs d’emplois pour les jeunes africains, une population appelée à doubler d’ici 2050.
Inclusion sociale : L'accès élargi au numérique réduit les inégalités, notamment en facilitant l'éducation, l'accès aux soins, l’autonomisation des femmes et des communautés rurales.
Soutien aux PME : Le numérique offre aux petites et moyennes entreprises ouest-africaines des outils pour toucher de nouveaux marchés, notamment grâce au commerce électronique et aux plateformes de paiement mobile.
Les gouvernements d’Afrique de l’Ouest l’ont compris et multiplient les initiatives :
Le Sénégal avec son programme Smart Sénégal,
Le Bénin avec son projet Benin Digital Transformation,
La Côte d’Ivoire avec le développement du Village Orange Digital Center,
Le Togo avec ses incubateurs numériques.
Ces efforts doivent cependant être consolidés par des politiques de connectivité inclusive, des stratégies nationales cohérentes, et des investissements massifs en infrastructures de base pour éviter que le numérique ne devienne un facteur d’exclusion supplémentaire.
L’Afrique numérique est en marche, mais pour ne laisser personne au bord du chemin, le défi du financement, de l’équité et de la formation reste colossal.