Crédit en UEMOA : un bond de 8,4 % en 2024, mais des disparités inquiétantes

(Crédit image : CADRECO)


Les points clés :

  • L’offre de crédit bancaire dans l’UEMOA a atteint 21 558,2 milliards FCFA en 2024, soit une croissance robuste de +8,4 % par rapport à 2023.

  • La Guinée‑Bissau affiche la plus forte progression (+205,9 %), alors que le Niger enregistre un recul marqué de −17,5 %.

  • Les prêts à l’équipement (+43,4 %) et l’immobilier (+13,4 %) tirent la dynamique, tandis que les crédits à l’exportation plongent de −36,1 %.


L’économie monétaire régionale de l’UEMOA confirme son redressement, porté par une accélération significative de l’offre de crédit bancaire. Les établissements financiers de la zone ont accordé 21 558,2 milliards de FCFA en prêts durant 2024, en hausse de 8,4 % par rapport à l’année précédente, où l’encours s’élevait à 19 889,1 milliards FCFA.

Cette croissance, certes encourageante pour la stabilité macroéconomique, masque toutefois de fortes divergences entre États membres. À l’extrémité supérieure, la Guinée‑Bissau enregistre une progression spectaculaire de +205,9 %, portant son encours à seulement 309,6 milliards FCFA. La montée en puissance du Burkina Faso (+29,6 %) et du Mali (+22,7 %) contrastent avec la progression plus modeste de la Côte d’Ivoire (+3,2 %) et du Sénégal (+1,7 %). À l’inverse, le Niger a vu ses crédits bancaires reculer de −17,5 %, frappé par une chute des prêts aux entreprises, aux associations (ISBLM) et aux administrations.

L’analyse sectorielle révèle que les prêts à l’équipement ont bondi de +43,4 %, soulignant l’investissement industriel croissant dans la zone. Les crédits à l’immobilier (+13,4 %), à la consommation (+11,4 %) et les facilités de trésorerie (+7,8 %) complètent ce boom. À l’inverse, les crédits à l’exportation ont reculé de manière significative (−36,1 %). Dans leur répartition, les concours de trésorerie représentent encore près de la moitié du volume (47,7 %), suivis des prêts à l’équipement (14,3 %) et des crédits à la consommation (13 %).

Cette distribution se traduit également par une prédominance des sociétés non financières (73,9 % des crédits), tandis que les ménages représentent 18 % et les administrations publiques 6,3 %. Par ailleurs, la hausse touche tous les segments institutionnels : les ISBLM (+33 %), les sociétés financières (+29,2 %), les administrations publiques (+11,4 %), les ménages (+8,5 %) et les entreprises non financières (+7,3 %).

La maturité des prêts reste concentrée sur le court terme (75 % du total), bien que les crédits à long terme progressent de +36,8 % et ceux à moyen terme de +18,5 %, atténuant légèrement la dépendance aux liquidités immédiates. Enfin, les personnes morales représentent 88 % des bénéficiaires, tandis que la hausse de crédit aux particuliers reflète des gains modérés chez les hommes (+7,1 %) et les femmes (+6,1 %). Les MPME captent 52 % des crédits aux entreprises, en progression notable au détriment des grandes firmes.

Secteur par secteur, l’industrie ralentit globalement (+19,9 %), le tertiaire progresse (+5,5 %) et le primaire dévisse (−29,8 %). Dominant toujours largement, les services constituent 64 % des financements, avec le commerce à 31 %, la fabrication à 15 %, l’administration publique à 11 %, et l’agriculture, la pêche et la sylviculture réunies à 4,4 %, en hausse légère.

Recoupements et limites de l’analyse

Les données consolidées présentées proviennent essentiellement du site Horonya Finance et, partiellement, d’une estimation BCEAO indiquant un volume comparable à 21 831,2 milliards FCFA en 2024 (+9,8 %). Ces chiffres divergents reflètent la difficulté d’obtenir des statistiques totalement homogènes dans la région. Les principales variables confirmées restent néanmoins la croissance globale de l’offre de crédit et la fracture intra‑régionale soulignée.

Pourquoi est-ce important ?

Cette forte progression de l’offre de crédit bancaire dans l’UEMOA est le signe d’une économie régionale en recomposition, tirée par l’impulsion privée des entreprises et MPME. L’essor des prêts à l’équipement et à l’immobilier témoigne de la modernisation progressive des infrastructures productives et résidentielles, ce qui peut accroître la productivité et générer des emplois.

Pour les MPME, essentielles à la création d’emploi et à la résilience économique, cette montée en puissance du crédit est positive. Leur part accrue dans les crédits totaux (52 %) souligne un accès élargi au financement, précieux pour leur croissance.

Cependant, les divergences nationales pointent les défis spécifiques de certains pays comme le Niger, en crise de financement. Les décideurs régionaux doivent donc renforcer la cohésion monétaire, harmoniser les conditions d’accès au financement, en particulier en faveur des femmes et des filières rurales, et corriger les déséquilibres.

Enfin, la prédominance des crédits court terme impose aux États et aux banques de poursuivre la transition vers des financements plus stables à long terme, pour soutenir les projets structurants. Le rôle de la BCEAO et des institutions régionales est crucial pour encadrer cette dynamique, limiter le surendettement et sécuriser le financement du développement durable.

Note : Les recoupements extérieurs sont limités par la disponibilité des données, mais les tendances identifiées sont corroborées par les publications régionales et la BCEAO.

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