Au Bénin, Kaadei et Mechac Goussanou digitalisent les commerçants et font entrer l’Afrique dans l’ère du retail intelligent


Les points clés :

  • La start-up béninoise Kaadei, fondée en 2024 par Mechac Goussanou, propose une plateforme numérique pour aider les commerçants physiques et en ligne à gérer ventes, stocks et facturation avec analyses en temps réel.

  • Parallèlement, Mechac Goussanou dirige la Web Design School, centre de formation UX/UI basé au Bénin, formant de jeunes talents africains aux métiers du design numérique et de l’expérience utilisateur.

  • Cette double dynamique, digitalisation du commerce local + montée en compétences numériques, s’inscrit dans un contexte béninois de transformation numérique accélérée, ouvrant des opportunités pour les PME et l’économie locale.

  • Au Bénin, l’entrepreneuriat numérique gagne du terrain. Parmi les acteurs montants, Mechac Goussanou incarne un profil hybride : product designer, entrepreneur, formateur. En 2024, il crée Kaadei, une start-up technologique dédiée à « l’accompagnement des e-commerçants africains », selon la source «We are Tech». L’entreprise se positionne sur le segment souvent négligé : les petits et moyens commerçants, physiques ou hybrides, en Afrique de l’Ouest.

La plateforme Kaadei entend simplifier la gestion quotidienne des activités : ventes, stocks, facturation, suivi temps réel et analyses de performance. Conçue pour « répondre aux réalités locales », elle est présentée comme un outil de transition pour les commerçants qui n’ont pas forcément accès aux infrastructures complexes ou aux logiques de gestion « Occidentales ».

Parallèlement, la Web Design School, dirigée par Goussanou, a pour mission de former des jeunes Africains aux compétences UX/UI, design produit, prototypage, etc. Ce maillon formation est essentiel : la digitalisation du commerce suppose non seulement des outils mais des acteurs qualifiés pour les gérer.

Cette initiative se greffe sur un contexte institutionnel qui favorise l’économie numérique au Bénin. Selon un rapport de l’écosystème digital béninois, le pays a adopté une politique numérique ambitieuse, mis en place des infrastructures de données et posé les fondations de la transformation digitale.

Pourquoi une innovation centrée sur les commerçants ?

Dans l’économie béninoise comme dans nombre de pays d’Afrique de l’Ouest, les commerçants, petits magasins, marchés, artisans, constituent un maillon essentiel : distribution, services, chaîne de valeur locale. Pourtant, beaucoup restent peu digitalisés, avec une gestion traditionnelle (papier, cahiers de comptes, absence d’analyses). Kaadei s’inscrit dans cette logique de « commerces connectés ».

En numérique, le défi n’est pas seulement d’avoir des boutiques en ligne, mais d’avoir une gestion efficace, des outils intégrés pour stock, facturation, suivi clients, et d’avoir accès à des données pour piloter l’activité. Kaadei propose une solution locale, adaptée, ce qui réduit la barrière entrée technologique. Le fait que l’outil vise « les opérations en magasin et en ligne » est important, car il reflète la réalité d’un commerce hybride en Afrique : pas seulement e-commerce pur, mais «phygital».

En arrière-plan, l’enjeu est stratégique pour le Bénin : accélérer la formalisation des commerces, améliorer la traçabilité, accroître les revenus des petites entreprises, renforcer la compétitivité des chaînes de valeur locales. Le numérique devient un levier de productivité.

Un impact sur le développement local et régional

La digitalisation des commerçants, lorsqu’elle est bien accompagnée, crée plusieurs effets. D’abord, elle permet d’améliorer la gestion : moins d’erreurs, meilleure visibilité des marges, gestion des stocks plus fine. Cela peut se traduire par des coûts réduits, des prix plus compétitifs et plus de résilience. Ensuite, une meilleure gestion ouvre la voie à l’accès au financement (les banques ou fintechs peuvent demander des données fiables, des historiques), ce qui est un frein souvent évoqué pour les PME en Afrique.

Enfin, en formant une nouvelle génération de designers, de développeurs UX/UI via la Web Design School, Goussanou contribue à la montée en compétence du secteur tech béninois, ce qui peut favoriser l’émergence de clusters numériques, attirer des investissements, et augmenter la valeur ajoutée locale. Cela s’inscrit dans une logique d’économie numérique plus large.

Les défis à ne pas sous-estimer

L’initiative est prometteuse mais fait face à des défis. Le premier est celui de l’adoption : convaincre les commerçants, souvent de taille modeste, d’investir temps et parfois argent dans une plateforme digitale. Si l’outil est adapté, encore faut-il qu’il soit connu, que la formation soit assurée, que l’accompagnement soit solide.

Le deuxième est celui de l’infrastructure et de la confiance numérique. Au Bénin, même si la digitalisation progresse rapidement, des limites persistent (connexion, coût internet, compétences). Le rapport de l’écosystème digital précise que pour que le numérique soit véritablement un levier, il faut aussi réduire la fracture numérique. 

Le troisième défi est celui de la monétisation et de l’évolutivité de Kaadei. Une start-up qui vise les PME doit créer un modèle économique durable, assurer la maintenance, la mise à jour, le support technique, tout en restant abordable. Le passage de la solution «petites entreprises» à un modèle scalable est souvent une étape complexe.

Pourquoi est-ce important ?

Pour l’économie ouest-africaine, cette initiative béninoise porte plusieurs leçons et effets possibles. D’abord, elle montre que la transformation numérique ne concerne pas seulement les grandes entreprises ou les plateformes internationales, mais aussi les commerces locaux, qui sont le cœur de l’économie. Quand un commerçant de quartier peut mieux gérer ses stocks, ses factures, ses ventes, cela se traduit par une plus grande stabilité, de meilleurs revenus, et donc une économie locale plus solide.

Ensuite, la montée en compétence numérique (via la Web Design School) est un facteur de développement structurel. Elle crée des emplois, des talents, et permet de retenir la valeur ajoutée au niveau local plutôt que l’importer. Cela renforce la souveraineté technologique et encourage l’innovation régionale.

Enfin, dans un contexte où les gouvernements ouest-africains s’engagent pour la digitalisation des services (comme au Togo, Bénin, etc.) et la formalisation des économies, Kaadei s’inscrit comme un complément essentiel. Les politiques publiques peuvent créer le cadre, mais ce sont les innovations citoyennes et entrepreneuriales qui le concrétisent sur le terrain.

En résumé, la digitalisation des commerces locaux via des plateformes comme Kaadei représente un levier de croissance inclusive, de modernisation économique et de compétitivité pour les pays d’Afrique de l’Ouest. C’est une partie souvent invisible de la révolution numérique du continent, mais essentielle.

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