Fusion Predictive-Robex (1,5 Md $) : la Guinée vise plus de 400 000 onces d’or par an

En fusionnant, Robex et Predictive misent sur les synergies (Crédit image : Acre Gold)


Les points clés :

  • Predictive Discovery et Robex Resources fusionnent dans une opération valorisée à 1,5 milliard de dollars, visant à créer l’un des grands producteurs d’or de Guinée.

  • Le nouveau groupe prévoit une production combinée dépassant 400 000 onces par an d’ici 2029, avec des ressources cumulées estimées à ~9,5 millions d’onces d’or.

  • Les projets phares sont Kiniero (139 000 onces/an pendant neuf ans, mise en service fin 2025) et Bankan (250 000 onces/an pendant plus de douze ans, avec décision finale attendue au 2ᵉ trimestre 2026).


L’Afrique de l’Ouest, riche de ses gisements aurifères, vient d’assister à l’annonce d’une fusion stratégique entre deux acteurs d’importance : la société canadienne Robex Resources et l’australienne Predictive Discovery. Annoncée le 6 octobre 2025, cette fusion de “pairs” (“merger of equals”) institutionnalise un regroupement valorisé à A$ 2,35 milliards, soit environ 1,5 milliard de dollars américains. L’entité issue de la fusion ambitionne de produire plus de 400 000 onces d’or par an d’ici 2029, en combinant principalement deux projets majeurs situés en Guinée, les mines de Kiniero et de Bankan, tout en conservant des opérations existantes au Mali (la mine de Nampala).

Cette opération intervient dans un contexte de forte concurrence aurifère en Afrique, de hausse des prix du métal, mais aussi de défis liés aux infrastructures, à la fiscalité, à la durabilité et à la gouvernance. En fusionnant, Robex et Predictive misent sur les synergies, l’expérience opérationnelle, l’optimisation des coûts, la proximité géographique de leurs projets, et la capacité à attirer des financements dans un secteur de plus en plus exigeant.

Détails de la fusion, chiffres et capacité de production

Le communiqué officiel détaille plusieurs données clés : le projet Bankan (Predictive Discovery) est estimé à une production moyenne d’environ 250 000 onces d’or par an pendant 12 ans. La décision finale d’investissement pour Bankan est attendue au deuxième trimestre de 2026.

Le projet Kiniero (Robex) est déjà en construction, avec un démarrage de la production prévu pour décembre 2025. La production estimée est de ≈ 139 000 onces/an sur une durée de neuf ans.

En plus, Robex opère déjà la mine de Nampala au Mali, dont le tonnage prévu pour 2025 est de 46-47 000 onces.

La fusion devrait aboutir à une société capable de produire plus de 400 000 onces d’or par an d’ici 2029, avec des ressources minérales combinées de l’ordre de 9,5 millions d’onces d’or, et des réserves de minerai (ore reserves) évaluées à ~4,5 millions d’onces.

Quant à la structuration de la gouvernance, les actionnaires de Predictive détiendront environ 51 % de la nouvelle entité, ceux de Robex environ 49 %. La finalisation du deal est prévue pour décembre 2025 ou début 2026, sous réserve des approbations réglementaires et d’une approbation des actionnaires de Robex.

Enjeux stratégiques et impacts attendus

La fusion entre Predictive et Robex est stratégique à plusieurs niveaux. D’abord, la proximité géographique des projets Bankan et Kiniero (tous deux en Guinée) permet d’économiser sur les coûts d’infrastructure, d’accroître l’efficacité logistique, et de mutualiser les compétences locales et les effectifs. Cette synergie peut améliorer les marges, réduire les délais de mise en production, et permettre une montée en puissance graduelle sans multiplier les coûts fixes.

Le renforcement de la capacité de production, plus de 400 000 onces/an, propulse la nouvelle entité parmi les acteurs intermédiaires/majeurs de l’or en Afrique de l’Ouest. Cela lui donnera une meilleure visibilité, une crédibilité accrue auprès des investisseurs, et une plus grande capacité à lever de nouveaux financements ou à s’étendre.

Cependant, les défis ne manquent pas. Les délais pour la mise en service (notamment de Kiniero fin 2025) et la prise de décision finale pour Bankan en 2026 doivent être respectés pour ne pas désillusionner les investisseurs. Le coût de développement, les questions d’études d’impact environnemental, la communauté locale, le cadre réglementaire guinéen, souvent sujet à des incertitudes, seront à surveiller. L’approvisionnement, la logistique, la sécurité, le coût de l’énergie, les taux de change et les exigences ESG sont autant de variables qui peuvent infléchir le succès.

Contexte régional et positionnement par rapport aux concurrents

Guinée, déjà réputée pour sa richesse minière en bauxite et son potentiel aurifère, pourrait devenir un des cinq premiers producteurs d’or du continent grâce à cette association. Précédemment, des projets tels que Kiaka (Burkina Faso), Bomboré, d’autres mines au Ghana ou en Côte d’Ivoire visent des productions importantes, mais très peu d’acteurs combinent plusieurs gisements à fort potentiel dans une seule entité.

La fusion peut accentuer la compétitivité de la Guinée non seulement en volume, mais aussi en coût, si les nouveaux producteurs parviennent à stabiliser les coûts d’extraction, à optimiser les transports, à maîtriser les infrastructures annexes (routes, énergie, logement) et à s’assurer de l’acceptabilité sociale.

À l’échelle de l’Afrique de l’Ouest, nombre de pays cherchent à attirer des capitaux dans le secteur minier. Le Mali, par exemple, a vu sa production baisser en 2024 (−23 %) mais compte sur la reprise de mines comme Loulo-Gounkoto pour relancer son activité.

Pourquoi est-ce important ?

Parce que cette fusion représente bien plus qu’un simple rapprochement d’actifs : elle peut redéfinir la géographie de la production aurifère en Afrique de l’Ouest. Pour la Guinée, c’est l’opportunité de consolider sa position comme l’un des grands producteurs d’or, d’augmenter ses recettes d’exportation, de renforcer les emplois locaux, et d’attirer davantage d’investissements dans le secteur minier. Une production annuelle supérieure à 400 000 onces représente des retombées fiscales significatives, des devises, et potentiellement un effet d’entraînement sur les services auxiliaires (logistique, infrastructures, technologies minières).

Pour la région, ce genre d’opération crée un précédent : il montre que des entreprises peuvent combiner des projets majeurs, mutualiser les risques, obtenir des synergies, et monter en taille. Cela peut encourager les acteurs locaux ou régionaux à structurer des coopérations, à négocier de meilleures conditions, et à attirer le capital international tout en exigeant des normes plus élevées, en matière environnementale, sociale, de transparence.

Cependant, le succès de ce pari dépendra de la capacité à respecter les échéances (mise en service de Kiniero, décision finale pour Bankan), à maîtriser les coûts, à gérer les implications sociales et environnementales, et à s’insérer dans un cadre réglementaire stable. Si la fusion doit profiter uniquement aux actionnaires sans bénéfice tangible pour les communautés locales, ou si les risques non anticipés pèsent lourd, la confiance pourrait être ébranlée, non seulement pour cette entreprise, mais pour tout le secteur.

En définitive, cette fusion intervient dans une période où l’or est redevenu une valeur refuge, où les chaînes de valeur minières cherchent à se rapprocher des marchés finaux, et où la durabilité, la gouvernance et la responsabilité deviennent des critères incontournables pour lever des fonds. Si Predictive-Robex réussit son pari, elle pourrait servir de modèle pour d’autres grands projets en Guinée, au Ghana, au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire, et au-delà.

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