D’une moto-taxi au Togo à une super-app panafricaine : Gozem s’allie à Belife Insurance pour accélérer l’inclusion financière en Afrique francophone
Les points clés :
Gozem, la “super-app” née au Togo, a levé 30 millions de dollars en 2025 pour étendre ses services, désormais rehaussée par le partenariat stratégique avec Belife Insurance.
Belife Insurance, acteur panafricain de l’assurance, entre désormais au capital de Gozem pour rendre l’assurance accessible aux chauffeurs, commerçants et travailleurs informels via l’application.
Cette alliance combine mobilité, fintech, assurance et inclusion, un modèle intégré qui, s’il se déploie, pourrait redéfinir l’accès aux services financiers et sociaux pour des millions d’Africains.
Lancée en 2018 au Togo comme service de moto-taxi, Gozem s’est rapidement transformée en super-application multiproduit. Aujourd’hui présente dans plusieurs pays d’Afrique francophone, Togo, Bénin, Gabon, Cameroun, elle offre non seulement du transport (moto, voiture, tricycle), mais aussi de la livraison, du e-commerce, du financement de véhicules, et depuis fin 2024, des services financiers via son portefeuille numérique.
Cette transition vers le modèle “super-app” s’est concrétisée par une série B de 30 millions de dollars annoncée en 2025, appuyée par des investisseurs de poids comme une filiale du géant maritime MSC Mediterranean Shipping Company et le fonds panafricain Al Mada Ventures. L’objectif est clair : financer davantage de véhicules pour les chauffeurs partenaires, accélérer l’expansion géographique, développer la fintech interne, et intensifier la digitalisation des services.
Le lancement de Gozem Money, en partenariat avec NSIA Bank Togo, constitue un autre jalon important. Cette plateforme de mobile money, disponible depuis fin 2024-2025, offre des services de transfert d’argent, paiement et gestion financière à bas coût, avec une interopérabilité sur les réseaux existants, ce qui répond au besoin d’inclusion financière dans des pays où l’accès à la banque traditionnelle reste limité.
Ainsi, Gozem n’est plus simplement une application de transport : elle se positionne comme un écosystème intégré capable de couvrir plusieurs besoins quotidiens des Africains, mobilité, biens, paiement, financement, à travers un seul outil numérique.
L’entrée de Belife Insurance : l’assurance accessible pour les “nouveaux Africains”
L’annonce d’un partenariat stratégique entre Gozem et Belife Insurance marque la volonté d’élargir le périmètre de l’inclusion financière et sociale. Belife Insurance, né du rachat des opérations de l’assureur international dans plusieurs pays francophones, est un groupe panafricain actif au Togo, en Côte d’Ivoire, au Cameroun…, avec l’ambition de proposer des produits d’assurance simples et accessibles, adaptés aux réalités africaines.
En entrant au capital de Gozem dans le cadre de la série B, Belife Insurance mise sur la “super-appisation” des services : rendre l’assurance disponible non plus comme un produit élitiste, mais comme un service de base accessible via mobile, combiné à la mobilité, au e-commerce et au paiement. Ce modèle pourrait s’adresser particulièrement aux chauffeurs, commerçants, travailleurs informels, des groupes souvent exclus des systèmes d’assurance classiques.
Pour les utilisateurs de Gozem, cela pourrait signifier la possibilité de souscrire facilement à une assurance via l’application, de bénéficier de couvertures adaptées à leurs revenus, et d’accéder à une protection sociale et financière accrue. Pour Belife, c’est l’opportunité de pénétrer un marché de masse, via une distribution numérique à large échelle.
Enjeux, défis et perspectives
Ce type de partenariat, entre une super-app de mobilité/fintech et un acteur d’assurance panafricain, pose les bases d’un modèle intégré d’inclusion économique et sociale. L’enjeu est de réussir à rendre l’assurance accessible à un segment large de population jusque-là mal couvert : chauffeurs informels, petits commerçants, travailleurs mobiles, populations urbaines mais à faible revenu.
Cependant, la réussite dépendra de plusieurs facteurs. D’abord la régulation : l’assurance digitale et les services financiers intégrés nécessitent un environnement réglementaire clair, des standards de protection des données, de gouvernance financière, et des mécanismes de recours pour les usagers. Ensuite, l’inclusion : pour que ces produits atteignent les plus vulnérables, il faudra non seulement un smartphone (ou un accès mobile) mais aussi de la littératie financière, une confiance dans le système, et des coûts abordables. Enfin, la qualité de service : les promesses d’assurance, indemnisation, couverture, fiabilité, devront être tenues pour que les utilisateurs adhèrent sur le long terme.
Si ces défis sont relevés, l’impact pourrait être considérable. En combinant transport, génération de revenus, paiement mobile, et protection sociale, Gozem + Belife peut créer un écosystème intégré dans lequel des millions d’Africains pourraient améliorer leur résilience, leur sécurité financière, et leur accès aux services de base.
Pourquoi c’est important ?
Parce que ce partenariat illustre une mutation profonde de l’économie numérique et sociale en Afrique francophone. Il dépasse la start-up locale : il dessine un modèle de développement qui combine tech, inclusion financière, mobilité, sécurité sociale, et entrepreneuriat.
Pour les pays de la sous-région, cela peut représenter une voie vers la réduction de la pauvreté urbaine et informelle, en donnant aux travailleurs précaires des outils pour stabiliser leurs revenus, accéder à des garanties et services, et s’insérer dans l’économie formelle.
Pour le secteur privé, c’est la démonstration qu’on peut construire des plateformes “à l’africaine”, ancrées localement, pensées pour des réalités africaines, et attirer des capitaux internationaux pour les développer. Ce modèle de “super-app + assurance + fintech + logistique” pourrait inspirer d’autres initiatives dans d’autres pays, et favoriser l’émergence d’une économie numérique véritablement inclusive.
Enfin, pour l’avenir, c’est une avancée vers l’intégration des services essentiels (mobilité, paiement, assurance) dans un réseau simple et accessible, un pas vers une Afrique où la digitalisation ne marginalise pas, mais inclut.