La BCEAO agrée 10 nouvelles fintechs : l’inclusion financière s’accélère dans l’UEMOA


Les points clés :

  • Dix nouveaux établissements de paiement viennent d’être agréés par la BCEAO à travers l’UEMOA, renforçant l’inclusion financière.

  • Parmi eux, figurent Ollo Africa au Togo, Julaya Bénin, Djamo Côte d’Ivoire, et plusieurs opérateurs sénégalais.

  • L’agrément est conditionné à la solidité opérationnelle, la transparence et une capacité financière, signe d’une stratégie de régulation prudente mais proactive.


L’Union Monétaire Ouest-Africaine (UMOA) vit depuis peu une phase de réorganisation accélérée de son écosystème des paiements. Selon Financial Afrik, la Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) a récemment agréé dix nouveaux établissements de paiement ; cette décision s’intègre dans une stratégie plus large de promotion de l’inclusion financière.

Parmi les nouveaux entrants, des fintechs locales aux services variés : Julaya Bénin, Open SI (Bénin), Kerry Payments (Burkina Faso), Djamo et PaymetrUst (Côte d’Ivoire), Cauridor (Mali), Julaya Sénégal, DJAMO Sénégal, African Financial Agent (Sénégal), et Ollo Africa (Togo) : un acteur notable, spécialisé dans la gestion des tontines digitales.

Le but affiché du régulateur est double : d’abord élargir l’accès des populations aux services financiers numériques, notamment dans les zones sous-servies, grâce à des opérateurs innovants ; ensuite, garantir que ces nouveaux entrants respectent des standards suffisants de fiabilité, de transparence juridique (notamment identité réelle, bénéficiaires effectifs), et de capacité opérationnelle et financière.

Données complémentaires, contexte et comparaisons

L’agrément de ces dix nouvelles fintechs porte le nombre total d’établissements de paiement agréés dans l’UMOA à environ 20, contre 11 fin mai 2025 selon d’autres sources. Cela signifie qu’en quelques mois, la BCEAO a presque doublé le nombre de prestataires officiels de paiements électroniques dans la zone.

Au Togo, Ollo Africa fait figure de cas intéressant : cette fintech, spécialisée dans les tontines numériques (épargne collective), ambitionne d’atteindre un million d’utilisateurs sur le territoire togolais. Sa solution permet de raccorder les pratiques traditionnelles d’épargne vers le formel, sous supervision.

La croissance des fintechs agréées répond à une demande forte : selon le dernier Tableau de bord de l’inclusion financière de la BCEAO, nombre d’individus dans l’UEMOA restent exclus des services financiers formels, notamment dans les zones rurales ou parmi les populations à faibles revenus ou informelles.

Impacts attendus

L’arrivée de ces nouveaux établissements de paiement devrait avoir plusieurs effets positifs. D’abord, une réduction des coûts de transaction pour les particuliers et les petites entreprises, grâce à la concurrence accrue et à des services plus digitalisés. Cela permettra aussi de limiter le recours excessif au cash, qui coûte cher en logistique et en sécurité.

Ensuite, un renforcement de l’inclusion financière : les populations jusque-là non bancarisées ou mal desservies pourront accéder à des services électroniques de paiement, d’épargne, de transfert d'argent, avec des solutions adaptées à leur contexte local (langue, frais, interface). Le cas d’Ollo Africa au Togo, ou de Julaya Bénin, montre cette volonté de rapprocher le service financier des communautés traditionnelles ou informelles.

Troisièmement, cela peut stimuler l’innovation locale dans les fintechs : de nouveaux modèles de paiement, de sécurité, de partenariats entre opérateurs locaux et institutions financières plus établies. En parallèle, la réglementation exigeante servira de garde-fou contre les risques de fraudes, de blanchiment, ou d’instabilité financière.

Risques et défis à surveiller

Toutefois, plusieurs défis persistent. Assurer la capacité opérationnelle des nouveaux entrants, leur solidité financière, et la transparence de leur gouvernance ne sont pas des formules replicables automatiquement : certains fintechs peuvent manquer d’expérience, de ressources, ou faire face à des problèmes d’infrastructure (connectivité, énergie, etc.).

La confiance des utilisateurs est un enjeu : les populations qui ont déjà vécu des arnaques ou des pratiques peu scrupuleuses peuvent être hésitantes. Le coût d’utilisation, la simplicité, et le service après-vente sont déterminants.

Ensuite, l’intégration dans le cadre réglementaire global (protection des données, respect des normes anti-blanchiment, supervision) est essentielle. La BCEAO semble adopter un contrôle prudent, exigeant transparence et identité des bénéficiaires effectifs.

Enfin, la montée en charge : la fintech peut croître localement, mais peut-être moins facile de s’étendre à d’autres pays ou zones si les cadres juridiques, fiscaux ou technologiques divergent fortement.

Pourquoi est-ce important ?

Parce que l’inclusion financière ne se mesure pas seulement en nombre de comptes ouverts, mais en qualité des services accessibles, abordables, sécurisés et utiles. Pour l’économie ouest-africaine, où une portion significative de la population reste en marge des services bancaires ou des paiements électroniques, la reconnaissance officielle de nouveaux établissements de paiement constitue une étape essentielle pour réduire cette exclusion.

Ces fintechs agréées constituent des leviers puissants pour la réduction de la pauvreté, l’amélioration de la résilience économique des ménages, la formalisation de l’économie, et l’amélioration de la collecte fiscale à travers des transactions plus traçables.

La modernisation des systèmes de paiement ouvre la porte à une meilleure intégration régionale : transfert transfrontalier plus simple, paiements internationaux plus sûrs, interopérabilité entre services nationaux. Cela renforce le marché unique ouest-africain, accroît la compétitivité des économies de la zone, et diminue la dépendance aux services financiers traditionnels plus chers ou moins accessibles.

En dernier, ce qui se joue ici est aussi une question de souveraineté numérique : lorsqu’il y a des acteurs locaux ou régionaux capables de proposer des services fiables, les données, les flux de paiements, l’expérience utilisateur restent davantage sous contrôle local, ce qui peut limiter les risques de captation économique ou de fuite de données.

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