Le Togo élu au Conseil des Gouverneurs de l’AIEA : un pas stratégique pour l’énergie nucléaire et la diplomatie internationale


Les points clés :

  • Le Togo a été élu parmi les onze nouveaux membres du Conseil des Gouverneurs de l’AIEA pour le mandat 2025-2027, aux côtés de pays comme le Portugal, la Roumanie et l’Arabie Saoudite.

  • Ce conseil, organe exécutif clé de l’Agence Internationale de l’Énergie Atomique (AIEA), supervise les garanties nucléaires, approuve le budget, le programme et les normes de sûreté de l’usage pacifique du nucléaire.

  • Pour le Togo, cette accession renforce son image diplomatique, offre un accès accru aux technologies pacifiques, à la formation, à la coopération scientifique, tout en lui donnant une voix dans les décisions internationales majeures sur la sécurité nucléaire.

L’AIEA (Agence Internationale de l’Énergie Atomique) est une organisation internationale dédiée à promouvoir l’usage pacifique du nucléaire, la sécurité, la non-prolifération et l’assistance dans les domaines scientifiques ou techniques associés. Le Conseil des Gouverneurs en est l’un des deux organes de gouvernance politique (avec la Conférence générale).

Lors de la 69ᵉ Conférence générale tenue à Vienne, le Togo a été élu parmi les 11 nouveaux membres appelés à siéger au Conseil des Gouverneurs pour la période 2025-2027, aux côtés de pays comme Belgium, Chile, Jordan, Lithuania, Niger, Peru, The Philippines, Portugal, Romania et Saudi Arabia.

Le Conseil des Gouverneurs de l’AIEA a plusieurs missions essentielles : il examine et recommande à la Conférence générale le programme de l’Agence, son budget, approuve les accords de garanties nucléaires, émet des normes de sécurité, nomme le Directeur Général (avec approbation de la Conférence générale), et supervise l’application des standards internationaux de sûreté, non-prolifération, etc.

Implications pour le Togo

L’élection du Togo au Conseil des Gouverneurs de l’AIEA offre plusieurs opportunités concrètes. Tout d’abord, elle donne au pays un siège à la table des décisions mondiales concernant l’usage pacifique du nucléaire — que ce soit pour l’énergie, la médecine (isotopes, radiothérapie), l’agriculture (amélioration des semences, de la santé des cultures), ou la gestion de l’eau. Cela ouvre des possibilités accrues de partenariats scientifiques, de transferts de technologie et de formation spécialisée.

Ensuite, cela renforce la crédibilité internationale du Togo en tant qu’État soucieux de sécurité, de non-prolifération, et de normes internationales. Cela pourrait faciliter l’accès à des financements ou à des coopérations techniques dans des projets nucléaires pacifiques ou en radioprotection.

De plus, cela aide à positionner le Togo dans les réseaux régionaux et continentaux de science, technologie et innovation nucléaire. Avec la demande croissante en Afrique pour des soins médicaux par radiothérapie, pour des technologies d’imagerie, des applications industrielles ou agroalimentaires du nucléaire, être membre influent de l’AIEA donne une voix dans la formation de règles, choix de priorités, et accès aux programmes d’aide technique.

Cependant, cela impose aussi des responsabilités accrues : conformité aux normes de sûreté, respect des obligations de divulgation, de coopération avec les initiatives de garantie et vérification, et investissement domestique dans les capacités scientifiques, régulation, infrastructure, et ressources humaines qualifiées.

Risques et défis

Un risque est que cette élection soit perçue comme symbolique si le Togo ne met pas en place les moyens institutionnels et réglementaires pour exploiter ce positionnement. Avoir un siège, ce sont des attentes : participation active, contribution à la Commission, suivi des décisions, capacité à bénéficier des programmes de coopération.

Il faudra également investir dans la capacité technique : laboratoires, normes nationales, contrôles, expertise en sûreté nucléaire, éventuellement renforcement du cadre légal national pour assurer transparence, sécurité, protection de l’environnement, etc.

La diplomatie scientifique doit aller de concert avec la diplomatie politique. Le Togo devra veiller à ce que sa voix soit entendue, non isolée, et coopérer avec des pays voisins et partenaires pour mutualiser les capacités, partager les meilleures pratiques.

Perspectives

À court terme, le Togo va probablement solliciter des projets de coopération avec l’AIEA dans des domaines prioritaires comme la santé (radiothérapie, imagerie), la sécurité alimentaire (radiations, post-récolte, conservation), la gestion de l’eau (isotopes pour étude hydrologique) et la formation de ses spécialistes nucléaires.

À moyen terme, ce positionnement pourrait aider le Togo à se doter d’infrastructures de sûreté, de régulation et à attirer des investissements dans les technologies nucléaires pacifiques. Cela pourrait aussi avoir un effet sur l’industrie, la recherche universitaire, les institutions médicales, la protection de l’environnement.

Sur le plan régional, le Togo pourrait jouer un rôle de coordination ou de relais pour les pays voisins moins avancés dans ce domaine, en partageant compétences, formation, appui réglementaire, ce qui pourrait renforcer l’approche ouest-africaine dans ce domaine.

Pourquoi est-ce important ?

Parce que l’énergie nucléaire, les usages pacifiques du nucléaire et la science associée ne sont plus seulement réservés aux puissances. Pour des pays comme le Togo, ce siège au Conseil des Gouverneurs offre une opportunité de patienter pour combler un fossé technologique, scientifique et réglementaire. Cela représente une chance de moderniser ses capacités nationales, de bâtir de meilleures infrastructures de santé, d’émarger aux programmes internationaux, de sécuriser ses usages (radio, imagerie, etc.), de se prémunir contre les risques, et de participer à la gouvernance globale des normes de sûreté et de non-prolifération.

Dans un contexte où les défis mondiaux, changement climatique, besoin de diagnostique médical avancé, sécurité alimentaire, etc., exigent des technologies pointues, le Togo se donne les moyens de ne pas rester simple bénéficiaire, mais acteur. Cela peut avoir des retombées économiques : attractivité pour les centres médicaux, pour les universités, pour les entreprises technologiques, pour les partenariats de recherche.

Pour l’Afrique de l’Ouest, c’est une marque de progrès scientifique, de capacité institutionnelle renforcée, de diplomatie multidimensionnelle. Si chaque État joue ce type de rôle, le continent peut peser davantage dans les décisions internationales concernant la science et la technologie, non seulement en recevant de l’aide mais en orientant les priorités selon ses propres défis, ses priorités sanitaires, climatiques et économiques.

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