e‑pineA : comment une appli béninoise transforme la filière ananas et révolutionne les débouchés agricoles

e‑pineA envisage d’intégrer d’autres cultures périssables comme la mangue ou le karité (Crédit Image : RFI)

Les points clés :

  • L’application e‑pineA connecte 1 800 producteurs béninois avec 200 acheteurs, réduisant les pertes post‑récolte et augmentant les volumes exportables.

  • Grâce à un financement de 50 000 € apporté par Digital Africa, la start-up Biolife Tech vise à étendre son modèle à d'autres cultures périssables.

  • La plateforme repose sur un modèle durable de conseil agronomique, de traçabilité et d’analyse prédictive pour stimuler les revenus des agriculteurs.

Au cœur du développement technologique en Afrique de l’Ouest, Biolife Tech, fondée à Abomey-Calavi, a lancé l’application mobile e‑pineA. Conçue spécifiquement pour la filière ananas, elle permet aux agriculteurs de signaler la maturité de leurs champs et de recevoir des offres d’achat de la part de traders et exportateurs. Avec la saisie des données de culture, de dates de plantation ou de variétés, l’algorithme prédit le rendement et optimise la planification des ventes. Plus de 1 800 producteurs et 200 acheteurs interagissent désormais via cette plateforme, réduisant les pertes jusqu’à 40 % et transformant ainsi des tonnes de fruits en revenus exportables. Apollinaire Houêton, producteur bio, voit ses volumes exportés passer de 5 à 10 tonnes grâce à la mise en marché facilitée par la plateforme.

Un appui financier stratégique pour grandir

Biolife Tech a bénéficié d’un soutien de Digital Africa (filiale de Proparco) à hauteur de 32 millions de FCFA (≈ 50 000 €), via l’incubation de Fuzé by Digital Africa. Ces fonds ont permis d’améliorer l’algorithmie, d’élargir le réseau d’agriculteurs et de renforcer la logistique numérique. L’investissement s’inscrit dans une logique de scalabilité : e‑pineA envisage d’intégrer d’autres cultures périssables comme la mangue ou le karité, avec pour ambition de capturer 40 % du marché national d’ananas et 15 % du marché ouest-africain d’ici 2026.

Un modèle inclusif qui promeut pratiques durables et transition numérique

Au-delà d’un simple outil commercial, Biolife Tech intègre un volet d’accompagnement agronomique. Menée par Ulrich Djido, agronome cofondateur, l’entreprise promeut des pratiques durables telles que la rotation des cultures, l’usage de légumineuses ou d’intrants organiques. Plus de 1 000 acteurs, majoritairement des femmes et des jeunes, ont bénéficié de formation à l’utilisation de l’application, renforçant leur littératie digitale et leur autonomie économique. Par ailleurs, e‑pineA fonctionne avec des frais d’entrée faibles (≈ 5 USD pour commencer, abonnement annuel de 10 USD, commission de 5‑10 % par transaction) accessible aux petits agriculteurs.

Pourquoi est‑ce important ?

L’expérience e‑pineA illustre une voie concrète pour transformer les petites exploitations agricoles en acteurs intégrés de chaîne de valeur numérique. En réduisant le gaspillage, en garantissant une visibilité sur la production et en simplifiant l’accès au marché, la plateforme rehausse les revenus et la dignité économique des agriculteurs. Ce modèle participe à l’objectif global de modernisation des économies ouest-africaines, en promouvant l’agritech comme catalyseur de croissance inclusive.

Dans un contexte où les pertes post-récolte peuvent atteindre 30 à 40 %, les solutions numériques comme e‑pineA offrent une alternative rentable et scalable, susceptible d’être adaptée à d’autres produits agricoles fragiles. Sur l’ensemble du continent, ce type d’innovation peut contribuer à renforcer l’industrialisation agricole, à structurer les filières locales, à attirer des investisseurs et à améliorer la sécurité alimentaire.

Les efforts de Biolife Tech s’inscrivent dans un mouvement plus large : renforcer l’entrepreneuriat local, valoriser l’économie verte, connecter les écosystèmes agricoles au commerce régional et international. Ils témoignent qu’un petit app, allié à une vision durable et à un appui ciblé du capital-risque d’impact peut redéfinir le rôle du rural dans la chaîne de l’économie ouest-africaine.

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