Explosion du trafic mobile en Afrique subsaharienne : vers une révolution numérique ?
Les abonnements 5G devraient exploser (Crédit image : Olumide Bamgbelu/Unplash)
Les points clés :
Le trafic moyen par smartphone va tripler d’ici 2030, passant de 5 Go à 14 Go par mois.
Le trafic total sur les réseaux mobiles atteindra 11 exaoctets par mois, contre 2,3 exaoctets en 2024.
Les abonnements 5G devraient exploser, passant de 11 millions aujourd’hui à 400 millions d’ici 2030.
Le Sud du Sahara est en train de vivre une mutation digitale sans précédent. Selon l’Ericsson Mobility Report de juin 2025, la consommation moyenne de données mobiles par smartphone va bondir, presque tripler, entre 2024 et 2030, passant de 5 Go à 14 Go par mois, soit une croissance annuelle moyenne de 19 % . Mais ce n’est pas tout : le volume total de données transitant sur les réseaux mobiles va atteindre 11 exaoctets mensuels en 2030, contre 2,3 exaoctets en 2024, à un rythme de progression de 29 % par an .
Ces chiffres ne sont pas de simples projections techniques : ils sont le signe tangible de l’adoption accélérée des smartphones, de la baisse des tarifs data, de l’émergence de contenus gourmands comme la vidéo, et de l’essor des usages à base d’IA et de réalité augmentée. Les revenus moyens progressent, la demande en data s’envole, et les populations, de plus en plus connectées, consomment toujours plus.
Le déploiement de la 5G joue un rôle central dans ce phénomène. Le rapport montre que le nombre d’abonnés à la 5G en Afrique subsaharienne passera de 11 millions en 2024 à 400 millions en 2030 – soit près de 31 % du total des abonnements mobiles. Sur la même période, les technologies 2G et 3G seront reléguées à 32 % des abonnements, contre plus de 50 % actuellement. La 4G restera un pilier, mais cédera sa position dominante à la 5G à mesure que le continent rattrapera son retard.
Cette expansion est également symptomatique d’un écosystème numérique en pleine maturation. Le rapport d’Ericsson souligne que les fournisseurs de services mobiles diversifient leurs offres, surtout dans le domaine du fintech (mobile money) et du Fixed Wireless Access (FWA). De fait, le digital devient un levier stratégique de résilience, d’inclusion financière et d’accès au haut débit, particulièrement dans les zones non câblées.
D’un point de vue économique, cette transformation est porteuse d’une dynamique puissante. Les usages intensifs de data en Afrique de l’Ouest favorisent l’émergence de nouveaux services digitaux : agritech, edtech, santé mobile, e-commerce, gouvernance électronique. Ils stimulent les revenus des opérateurs, élargissent la base fiscale, et renforcent la compétitivité des économies régionales.
Des pays comme le Sénégal, le Ghana, le Nigeria ou le Kenya sont en première ligne, grâce à des politiques favorables : attribution de spectre 5G, incitations fiscales, soutien au secteur privé, et encouragement des investissements en infrastructures. Les populations jeunes, urbaines et connectées sont au cœur de cette révolution, propulsant une nouvelle dynamique de croissance.
En ouvrant la voie à un continent enfin connecté, cette croissance s’accompagne aussi de défis à relever : améliorer la qualité des réseaux, assurer la cybersécurité, renforcer les compétences numériques, et garantir l’accessibilité pour tous.
Pourquoi est-ce important ?
Parce que le triplement de la consommation de données mobiles n’est pas seulement un indicateur technologique : c’est le reflet d’un basculement économique. Il symbolise l’intégration du numérique dans la vie des Africains, renforce la souveraineté des économies régionales et stimule le développement de secteurs cruciaux tels que la fintech, l'agritech ou la e-santé. Elle illustre aussi les énormes efforts consentis par les opérateurs et les États ouest-africains pour accélérer la 5G, diversifier les services et tirer parti de l’essor technologique. A terme, cette transition pourrait être le vecteur d'une croissance inclusive, d'une meilleure résilience économique et d'une plus grande intégration régionale à l’ère du digital.