Ghana : un plan à 4 milliards $ pour créer 1,7 million d’emplois et transformer l’économie
Un plan ambitieux (Crédit image : Cashew Dunkel)
Les points clés
Le Ghana vise à mobiliser 4 milliards de dollars sur quatre ans pour son ambitieux programme « 24‑Hour Economy ».
Ce plan, lancé début juillet 2025 par le Président Mahama, promet 1,7 million d’emplois créés via une redéfinition de la productivité nationale .
L’État s’engage à injecter 300–400 millions en fonds initiaux, pour attirer investisseurs, banques de développement et financeurs privés .
Le Ghana entre dans une nouvelle ère avec son programme « 24‑Hour Economy », une initiative audacieuse destinée à faire de chaque heure du jour un vecteur de croissance économique. Initié par le président John Dramani Mahama et officiellement lancé le 2 juillet 2025, ce projet n’est pas un simple slogan populiste, mais une stratégie approfondie articulée autour de quatre axes fondamentaux : la production, la transformation, la chaîne logistique et le capital humain .
L’ambition est claire : générer 1,7 million d’emplois sur quatre ans, tout en restructurant le paysage industriel, agricole et des services. Pour y parvenir, l'exécutif prévoit de mobiliser un financement de 4 milliards $, dont 300 à 400 millions seront fournis par l'État comme capital initial. Le reste sera levé auprès d’institutions financières, de la diaspora et d’investisseurs privés, notamment par le biais de partenariats public-privé et de financements mixtes.
Ce plan se décline en huit sous-programmes thématiques — Grow24 (agriculture), Make24 (manufacture), Build24 (infrastructures), Connect24 (logistique), Fund24 (financement), Show24 (culture/tourisme), Aspire24 (compétences) et Go24 (gouvernance), pour couvrir tout l’écosystème économique. L'objectif : briser le modèle actuel où l'exportation de matières premières ne crée pas assez de valeur ajoutée sur place .
Le plan prévoit des incitations fortes pour les entreprises : exonérations douanières, crédits bonifiés, rabais fiscaux jusqu’à 50 % pour celles opérant en trois shifts, hausse des exportations traitées de 2 à 6 %, ainsi que des tarifs réduits énergie la nuit. Des parcs industriels modernes, alimentés notamment par les énergies renouvelables, seront implantés dans chaque région pour soutenir cette activité continue.
Techniquement, ce programme repose sur un véritable arsenal institutionnel, incluant la création de l’Autorité 24‑Hour Economy et l’amendement de plusieurs lois fiscales, commerciales et sectorielles. Un projet pilote est prévu d’ici août 2025 pour 50 entreprises volontaires, avec une structure juridique sur mesure pour assurer son intégrité et sa pérennité.
Le Ghana, confronté à un endettement élevé, une inflation à deux chiffres et une pression sur le taux de change, tente avec ce programme de rompre avec l’économie traditionnelle de matières premières. Le défi est double : restructurer l’économie pour créer plus d’emplois, tout en stabilisant les finances publiques et la compétitivité externe.
Cette initiative n’est pas sans précédent : elle s'inspire des plans d’industrialisation réussis tels que Singapour ou la Malaisie, mais s’en distingue par sa volonté d’activer l’économie 24 h/24. L’enjeu est de transformer la Côte d’Ivoire agricole de l’Afrique subsaharienne en une véritable plateforme régionale de production et d’exportation. Les outils mobilisés – incitations fiscales, financement ciblé, infrastructures et cadre juridique évolutif – sont cohérents, mais la réussite dépendra largement de la capacité à mobiliser et canaliser les 3,6 milliards $ restants via un partenariat public‐privé clairement orchestré.
Parmi les risques, l’absence de chiffrage détaillé sur les retombées sectorielles, la dépendance au contexte mondial et financier, et la complexité institutionnelle à mettre en place en l’espace de quelques mois . L’expérience précédente du programme « One District, One Factory » avait montré certaines limites : malgré des milliards investis, peu de résultats tangibles. Le Ghana devra donc veiller à éviter les écueils de la promesse non tenue.
Pourquoi est-ce important ?
Parce qu’il marque une rupture dans la pensée économique en Afrique de l’Ouest, où il est rare qu’un pays mise sur une rehausse massive de la productivité nationale par le biais de mesures proactives et structurées. Si l’objectif est atteint, ce programme pourrait produire un effet domino : levier d’attraction pour des investissements régionaux, intensification de la diversification économique, et amélioration de la résilience face aux chocs extérieurs.
Concrètement, l’impact sur l’économie ouest-africaine serait multiple : moins de dépendance aux importations, renforcement des capacités industrielles, intégration de jeunes talents dans un écosystème numérique, et illustration d’un modèle exportateur renouvelé. Le signal envoyé – un État invitéillant des acteurs pour transformer les ressources naturelles en valeur ajoutée locale – pourrait inspirer d’autres pays de la région.
Pour réussir, le Ghana devra non seulement convaincre les institutions financières internationales et les marchés, mais surtout démontrer aux populations et aux entreprises que cette 24‑Hour Economy n’est pas un mirage, mais un projet palpable, équitable et concret. Le succès ou l’échec de cette ambition aura des répercussions profondes sur la trajectoire économique de l’Afrique de l’Ouest pour la décennie à venir.