Frontières fermées, options limitées : le Niger explore de nouvelles voies pour son uranium

Frontière Niger - Bénin (Crédit image : Yop-Lfrii)

Points clés :

  • Le Niger explore de nouveaux corridors pour exporter son uranium suite à la fermeture de la frontière avec le Bénin.

  • Les projets d'infrastructure avec l'Algérie et l'utilisation du port de Lomé sont envisagés, malgré des défis logistiques et sécuritaires.

  • La reprise de l'exploitation par des entreprises chinoises et canadiennes souligne l'importance stratégique de l'uranium nigérien.

Depuis juillet 2023, la fermeture de la frontière entre le Bénin et le Niger a bouleversé les circuits traditionnels d'exportation de l'uranium nigérien. Face à cette situation, Niamey explore des alternatives pour maintenir ses exportations, essentielles à son économie.

Des corridors alternatifs en cours d'évaluation

Historiquement, le port de Cotonou au Bénin servait de principal point de sortie pour l'uranium nigérien. La fermeture de la frontière a contraint les autorités nigériennes et les entreprises minières à envisager d'autres options. Parmi celles-ci :

  • Le corridor algérien : Le Niger partage une frontière de 951 km avec l'Algérie. Des projets de construction d'un port sec à Agadez et d'une voie ferrée sont envisagés pour faciliter l'accès aux ports algériens. Cependant, ces infrastructures ne seront pas opérationnelles à court terme.

  • Le corridor via le Togo et le Burkina Faso : Actuellement, une partie des échanges commerciaux transite par le port de Lomé, en passant par le Burkina Faso. Ce corridor est déjà utilisé pour d'autres exportations, mais il présente des défis sécuritaires.

  • Le corridor nigérian : Bien que le Nigeria partage une longue frontière avec le Niger, les défis logistiques et sécuritaires rendent cette option complexe.

  • Le transport aérien : Bien que coûteux, le transport par avion reste une option. En 2024, la société française Orano avait proposé cette solution, avec un transit par la Namibie, mais elle n'a pas été retenue par Niamey.

Reprise des activités minières : un enjeu économique majeur

L'uranium représente une part significative des exportations du Niger. En 2023, il constituait environ un tiers des exportations totales du pays. La fermeture de la frontière avec le Bénin a donc eu un impact économique considérable.

Plusieurs entreprises minières s'activent pour relancer ou démarrer leurs opérations :

  • Global Atomic : Cette compagnie canadienne prévoit de lancer la production d'uranium en 2026 à sa mine Dasa, actuellement en construction. Elle explore des itinéraires de transport alternatifs via l'Algérie, le Nigeria et le Togo/Burkina Faso.

  • Société des Mines d'Azelik (Somina) : Majoritairement détenue par des investisseurs chinois, cette société a annoncé la reprise de ses activités d'exploitation de l'uranium, suspendues depuis 2014.

Par ailleurs, la société française Orano, qui exploitait la seule mine d'uranium en activité au Niger, a suspendu ses opérations en 2024, suite à des tensions avec les autorités nigériennes. La société a même perdu le contrôle de sa filiale locale.

Défis sécuritaires et logistiques sur les nouveaux corridors

L'utilisation de corridors alternatifs n'est pas sans défis. En novembre 2024, un syndicat nigérien de transporteurs a dénoncé les attaques djihadistes contre les convois empruntant le corridor menant du port de Lomé au Niger, à travers le Burkina Faso. Le syndicat a également pointé du doigt des tracasseries administratives et des rackets.

Ces défis sécuritaires et logistiques compliquent la mise en place de routes d'exportation fiables et efficaces pour l'uranium nigérien.

Pourquoi est-ce important ?

L'uranium est une ressource stratégique pour le Niger, représentant une part importante de ses exportations et de ses recettes en devises. La perturbation des circuits d'exportation a des répercussions économiques majeures pour le pays.

Au niveau régional, la situation met en lumière la nécessité pour les pays ouest-africains de diversifier leurs infrastructures de transport et de renforcer la coopération régionale pour assurer la résilience économique face aux crises politiques et sécuritaires.

Enfin, sur le plan international, la réorganisation des circuits d'exportation de l'uranium nigérien pourrait influencer les marchés mondiaux de l'énergie nucléaire, en fonction des partenaires choisis par Niamey pour ses exportations futures.

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