Le Bénin lève le visa pour les croisiéristes : une stratégie audacieuse pour faire escale au‑dessus du tourisme

Le Bénin opère une révolution douce mais profonde dans sa stratégie touristique (Crédit image : Gouverneur du Bénin)


Les points clés :

  • Le Bénin accorde désormais une exemption de visa de 72 heures pour les passagers de croisières en escale à Cotonou.

  • Trois grands navires (Seabourn Sojourn, Crystal Symphony, SH Diana) ont fait escale en 2025, démontrant le potentiel croissant du secteur.

  • Cette mesure s’inscrit dans une stratégie visant à faire du Bénin une escale haut de gamme incontournable en Afrique de l’Ouest.


La décision béninoise d’ouvrir ses portes aux croisiéristes sans visa pendant 72 heures résulte d’un calcul économique finement calibré. Annoncée par le gouvernement le 30 juillet 2025, cette exemption est applicable aux passagers des navires faisant escale à Cotonou et pris en charge par une agence de voyages agréée. Elle s’accompagne d’un protocole d’accueil assuré par la Police Républicaine et les autorités portuaires pour garantir un débarquement fluide et sécurisé.

Au cours de la seule année 2025, trois paquebots de prestige ont marqué un tournant : le Seabourn Sojourn en février, le Crystal Symphony en avril, ce dernier étant le plus grand navire jamais accueilli au Bénin, et le SH Diana également en avril. Ces escales successives attestent d’un repositionnement stratégique du port de Cotonou comme escale de référence régionale.

Le secteur du tourisme de croisière, jusqu'alors embryonnaire au Bénin, devient un levier de croissance. Le gouvernement vise à atteindre 2 millions de visiteurs par an d’ici 2030, avec une contribution du tourisme au PIB qui passerait de 6 % à 13,4 %. Afin de concrétiser cette vision, plus de 2 milliards d’euros d’investissements ont été mobilisés pour moderniser les infrastructures, créer des sites culturels et patrimoniaux, et diversifier l’offre touristique.

Lors de leurs escales, les croisiéristes découvrent un itinéraire touristique riche : Cotonou, Ouidah, Porto‑Novo ou encore Ganvié, réputée « Venise de l’Afrique de l’Ouest ». L’agence nationale Bénin Tourisme pilote l’opération sous la bannière « Un Monde de Splendeurs », visant à séduire un public international exigeant à la recherche d’authenticité et d’expériences culturelles marquantes.

Pourquoi est‑ce important ?

Le Bénin opère une révolution douce mais profonde dans sa stratégie touristique. D’une part, il profite du tourisme de croisière pour créer une valeur économique immédiate : dépenses locales sur les excursions, restauration, transport, artisanat et hébergement. D’autre part, il envoie un signal clair aux compagnies maritimes : Cotonou est désormais une escale agréable, sécurisée, attentive à l’expérience client.

Cette politique s’inscrit dans une dynamique plus large, positionnant le Bénin parmi les rares pays d’Afrique de l’Ouest à capter la croissance du marché des croisières, encore modeste dans la région. Elle permet aussi de diversifier les flux touristiques ordinaires (avion, terrestre), et d’intégrer le pays dans les itinéraires lus luxe et culturellement enrichissants.

L’effet domino est palpable : modernisation des sites, formation d’acteurs locaux, montée en gamme des services, structuration du secteur touristique et mutation des attentes des opérateurs. Les retombées peuvent aussi se mesurer en emplois directs et en structuration du petit commerce, de l’offre artisanale et de l’hôtellerie. Par ailleurs, la visibilité internationale acquise par ces escales prestigieuses participe à un effet d’image bénéfique sur l’ensemble de l’économie béninoise.

Sur un plan géo-économique ouest-africain, le Bénin inspire ses voisins dans la valorisation de l’économie bleue et l'accueil de croisiéristes. Avec l’essor du tourisme de croisière continentale, la concurrence régionale peut renforcer la coopération portuaire, les relais de transport, voire l’offre conjointe (axes Lomé‑Cotonou‑Accra, etc.).

En conclusion, l’exemption de visa de 72 heures pour les croisiéristes est bien plus qu’un geste symbolique : c’est un outil stratégique d’attractivité, de diversification économique, irrigué par la culture, l’hospitalité et les infrastructures renfoncées. Grâce à cette mesure, le Bénin franchit une nouvelle étape vers la transformation inclusive de son tourisme et de son écosystème commercial.

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