Ghana : 2,8 milliards $ de soulagement, le rebond économique en route ?
Affluence au marché d’Accra (Crédit image : Maroc diplomatique)
Les points clés :
Ghana obtient un allègement de dette de 2,8 milliards $ de 25 créanciers, dont la Chine et la France.
Les paiements suspendus jusqu'en 2026 seront repoussés à 2039‑2043 à taux bas (1‑3 %).
L’opération débloque l’accès à un prêt du FMI de 3 milliards $, renforçant les perspectives de stabilité.
Le Ghana vient de franchir un jalon déterminant. Alors que son parlement a récemment validé un accord de restructuration incluant 25 créanciers, de puissances comme la Chine, les États‑Unis, la France et le Royaume‑Uni, le pays s'offre un répit financier de 2,8 milliards dollars. Conclu en janvier, ce cadre de redressement marqué par une suspension des paiements jusqu’en 2026 et un report des remboursements à 2039‑2043 à des taux avantageux (1‑3 %) permet à Accra de respirer à moyen terme .
Ce montage constitue la condition sine qua non à la poursuite du programme aidé par le FMI, dont l’accord de 3 milliards $ débloqué en mai 2023 dépendait de la restructuration de la dette . Avec déjà 600 millions $ versés, cette étape majeure permet de débloquer un troisième versement, potentiellement dès juillet, conditionné par la mise en œuvre de réformes fiscales et budgétaires, jugées essentielles par les bailleurs .
Dans ce cadre, le Ghana bénéficie d’une fenêtre de trois ans pour consolider ses finances publiques. Le gouvernement Mahama s’engage à revoir les subventions à l’énergie, renforcer la fiscalité et rationaliser les dépenses publiques. Le pays a lancé un audit de ses arriérés, introduit un plafond de dette fixé à 45 % du PIB d’ici 2035 et adopté une mission de réduction drastique du déficit, ciblé à 3 % du PIB en 2025.
En dépit de ce répit, la route reste escarpée. Accra doit encore finaliser la restructuration auprès des créanciers privés (environ 2,7 milliards $ restants) et prouver sa capacité à tenir les engagements. L’inflation reste élevée (~23 % début 2025) malgré un reflux notable depuis l’an dernier, et le taux de croissance pour 2025 est modeste, autour de 4,4 % selon le FMI.
Impacts sur l’économie ouest-africaine et réponses nationales
Le succès de cet accord marque une première en Afrique de l’Ouest, où les restructurations collectives impliquant des créanciers internationaux ont été rares. Il envoie un signal positif : les institutions financières mondiales montrent qu’elles peuvent travailler ensemble, y compris avec des créanciers émergents, comme la Chine, représentée par un accord multipartite.
Pour ses voisins, le Ghana est un modèle : renforcer la gestion budgétaire, assainir les finances publiques et s’ancrer dans un programme FMI permettent de restaurer la confiance des investisseurs, un levier essentiel pour attirer des fonds régionaux et internationaux.
Plus largement, la normalisation des relations économiques avec les bailleurs et les marchés contribue à stabiliser le yuan, le cedi ghanéen et les échanges dans la zone CEDEAO. À l’instar du Sénégal ou de la Côte d’Ivoire, qui multiplient les ajustements fiscaux et les réformes économiques, le Ghana montre la voie d’une gestion plus disciplinée et résiliente.
Pourquoi est‑ce important ?
Cet accord offre au Ghana une bouffée d’air indispensable, mais surtout il pose les fondations d'une gouvernance économique tournant vers plus de rigueur, transparence et efficacité. C’est un signal fort envoyé à la communauté financière : l’Afrique de l’Ouest est capable de conduire des réformes structurelles, de négocier avec des partenaires multilatéraux et de surmonter ses crises sans renoncer à sa souveraineté. Enfin, en stabilisant le Ghana, c’est toute la sous-région qui limite la contagion financière, favorisant un climat propice à l’investissement privé, à la croissance inclusive et à la création d’emplois.