Crypto-piège en série : comment la pyramide de Ponzi “CBEX” a asséché les économies africaines

Une illusion d'intelligence artificielle et de profits rapides (Crédit Image : Les Echos)


Les points clés :

  • CBEX a promise des rendements de 100 % par mois via IA, ruinant des milliers d'Africains.

  • Les pertes s'élèvent à plusieurs milliards de dollars, estimation limitée aux seuls Nigeria et Kenya.

  • La faiblesse des régulations favorise ce type d'arnaque sophistiquée.


Décrit comme une plateforme de trading basée sur l’IA offrant des retours miraculeux de 100 % en 30 jours, CBEX, alias Crypto Bridge Exchange, a ciblé des investisseurs au Kenya, au Nigeria et au-delà. Edwin, un fonctionnaire kényan, a perdu 2,1 millions de shillings (~14 000 €), entraînant dettes et honte. Déjà en 2024, l'AFP soulignait que CBEX avait récolté environ 9,9 milliards de dollars à l’échelle mondiale dans des escroqueries crypto.

CBEX utilisait le « brandjacking » en volant le nom d'entités légitimes comme ST Technologies ou la China Beijing Equity Exchange, affichant des certificats de la EFCC au Nigeria pour convaincre. Interpol, le FBI et la SEC nigériane ont ouvert des enquêtes alors que des bureaux physiques étaient pillés sur fond de colère populaire.

Un schéma Ponzi clairement établi

CBEX combinait marketing multi-niveaux et promesses de profits garantis. TechCabal a tracé les flux via la blockchain TRON, démontrant que les fonds étaient transférés dès la réception et rendus invisibles grâce à des cascades de portefeuilles et de conversions. La promesse d’intelligence artificielle visait évidemment à renforcer la confiance et masquer la fraude.

Au Nigeria, plus de 600 000 investisseurs ont perdu au total environ 1,3 trillion de nairas (~1,3 milliard de dollars). Au Kenya, des milliers d’autres victimes sont endettés et appauvris. L’arnaque ne ruine pas seulement des citoyens mais fragilise également la confiance dans la crypto, freinant l’adoption saine tout en alimentant l’argument d’un contrôle renforcé par les autorités.

Vers plus de régulation et de vigilance citoyenne

Les autorités nigérianes ont instauré des peines de prison pour les promoteurs et exigent désormais une régulation claire des actifs virtuels . Le Parlement kényan étudie une loi anti-crypto pyramidale, tandis que les régulateurs de marchés ont publié des alertes massives . Mais les enquêtes restent lentes et les fonds difficiles à récupérer.

Une arnaque révélatrice d’un écosystème vulnérable

Edwin confie à l’AFP : « J’avais de très grands projets… mais j’ai été trompé » (guardian.ng). A Lagos, Rasheedah, commerçante, a perdu toutes ses économies. « Owo mi ti lo », « mon argent est parti », témoigne-t-elle. Abby, au Kenya, pleure sa responsabilité d’avoir persuadé ses proches d’investir.

Le modèle CBEX repose sur un environnement marqué par des failles en matière de régulation et d’éducation financière. Le manque d’information pousse des investisseurs non avertis à céder aux promesses de rendements exponentiels. Le recours à des plateformes comme Telegram et le parachèvement de certifications bidon illustrent la créativité des escrocs .

Pourquoi est-ce important ?

Au-delà des pertes individuelles, l’affaire CBEX révèle un enjeu collectif pour l’Afrique : l’urgence de renforcer la cybersécurité financière, d’élargir l’éducation aux cryptos et d’harmoniser les régulations nationales. Les pays comme le Nigeria et le Kenya, à la pointe de l’adoption digitale, doivent bâtir une architecture de confiance pour les actifs numériques. Sans cela, les escroqueries mineront l’émergence d’une économie numérique viable. L’histoire de CBEX doit inciter à agir collectivement.

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